Carte zone Natura 2000 habitats et oiseaux
− @Géoportail.gouvLa pêche française est en danger !
Afin de sensibiliser et d’interpeller les pouvoirs publics, les pêcheurs ont décidé de manifester leur colère en bloquant les ports les 30 et 31 mars. Les raisons de cette colère sont nombreuses et cette accumulation amène les professionnels du secteur à un constat sans appel : la pêche française est en danger ! L’ensemble de la filière a déployé des efforts considérables ces dernières années, notamment en termes de limitation des impacts environnementaux et de préservation des ressources halieutiques, avec l’objectif de proposer aux consommateurs des produits frais et de qualité. Mais malgré ces efforts, le secteur est fragilisé par une série d’attaques et de toujours plus de contraintes règlementaires. Les pêcheurs, et derrière eux tous les maillons de la filière, doivent être entendus et ils ont besoin d’une réponse rapide et efficace des autorités.
Interdiction des engins de fond dans les Aires marines protégées et dans les zones Natura 2000
La Commission européenne a décidé fin février d’interdire les engins de pêche de fond dans les zones Natura 2000 (sites naturels contenant une faune et/ou une flore exceptionnelles) d’ici à l’année 2024 et dans les Aires marines protégées (AMP) d’ici à 2030 ; il s'agit du plan d’action pour la protection et la restauration des écosystèmes marins en faveur d’une pêche durable et résiliente.
Ce plan, qui concerne à terme 30% des eaux européennes, suscite la colère des pêcheurs, car il représente une portion conséquente des eaux dans lesquelles ils exercent leur métier. Dans ces zones, l'activité est encadrée par des règles précises, établies à la suite d'analyses risque pêche (ARP), un cadre défini et mise en place depuis 10 ans. En fonction de l'évaluation de ces risques, des mesures d'adaptation de la pêche doivent être mises en place pour réduire ces risques.
Par ailleurs, la filière pêche française a mis en place depuis plus de dix ans de nombreux projets « scientifiques-pêcheurs » pour améliorer les pratiques de pêche, la sélectivité et réduire l’impact des engins de pêche et notamment le chalut. Depuis 2012, pêcheurs et scientifiques se sont engagés dans plus de 30 projets, co-financés par France Filière Pêche pour un total de près de 17 millions d’euros. Ces projets sont consultables sur le site https://www.francefilierepeche.fr/projets/.
La sortie de flotte des navires : une réponse insatisfaisante aux conséquences du Brexit
La sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne (ou Brexit), effective depuis le 1er février 2020, a abouti à la remise en cause de l’accès aux eaux britannique et du partage des ressources halieutiques. En la matière, les pêcheurs français ont payé un lourd tribut avec des pertes de quotas très importantes. Certains bateaux se sont retrouvés en grande difficulté car leur activité se situait principalement dans les eaux britanniques.
Côté Méditerranée, c’est le plan de gestion West Med, qui a pour but de préserver les ressources halieutiques, qui impose aux entreprises de pêche une diminution du nombre de jours de sortie par an, ainsi qu’une interdiction de 2 zones importantes, 6 à 8 mois par an – et ce malgré la mise en évidence d’une forte perturbation de l’équilibre socio-économique des armements. Les pêcheurs s’étaient pourtant engagés dans des projets scientifiques permettant, notamment, la mise en place de dispositifs de protection des juvéniles.
Dans les 2 cas, on assiste à une perte de rentabilité économique telle pour les navires touchés, parfois des navires de plus de 30 ans avec des charges importantes, que la survie des entreprises en est compromise.
Pour répondre à cette situation, les autorités ont programmé pour la façade Atlantique un plan de sortie de flotte baptisé « Plan d’accompagnement individuel », et côté Méditerranée un « Plan de Sortie de Flotte » afin d’indemniser les entreprises qui n’ont d’autres choix que d’arrêter l’exploitation de leurs navires. Au total, plus d'une centaine de bateaux vont être détruits au terme d’un long processus administratif, en échange d’une indemnisation.
Cette issue laisse un goût amer aux pêcheurs, et un véritable sentiment d’abandon de la part des pouvoirs publics français quant à la défense de leurs métiers au niveau européen.
Captures accidentelles de dauphins : la filière ne reste pas les bras croisés !
Le 20 mars dernier, le Conseil d’Etat a rendu une décision pour contraindre le gouvernement, sous six mois, à adopter des mesures, notamment de fermetures spatio-temporelles, pour réduire les captures accidentelles de cétacés. Cette décision laisse entendre que ses acteurs sont restés inactifs depuis sept ans.
Or depuis 2017, les projets associant scientifiques et pêcheurs se sont multipliés pour tenter de comprendre et d’endiguer le phénomène : «Pic», «Licado», «Dolphinfree», «obsenpeche», «delmoges», «pifil», «apocado», « cetambicion», «pechdauphir», «obscam», «hydrophin», «balphin», «obsmer»… Par ailleurs, un groupe de travail, piloté par le gouvernement et rassemblant toutes les parties prenantes a été mis en place et se réunit régulièrement pour tenter de mettre en place des solutions.
Enfin, des décisions concrètes ont déjà été prises, avec un équipement obligatoire en pinger (dispositif acoustique censé éloigner les dauphins des bateaux), des chalutiers, une déclaration obligatoire des captures accidentelles et un suivi rigoureux des échouages.
De fait, ces dispositifs n’ont pas démontré une efficacité entièrement satisfaisante, cependant les professionnels et les scientifiques restent engagés dans la démarche de progrès. Les autorités ont alors mis en place un plan d’action national courant jusqu’à 2025. Des tests ont été lancés via une participation volontaire de la moitié de la flottille des fileyeurs et décision a été prise d’équiper les navires en caméras embarquées et en système de géolocalisation en vue d’une amélioration des connaissances. Par ailleurs, des fermetures spatio-temporelles sont d’ores et déjà prévues à l’hiver 2024-2025 dans le Golfe de Gascogne. Ces contraintes lourdes ont été acceptées par les pêcheurs, démontrant une nouvelle fois leur bonne volonté sur le sujet des captures accidentelles.
Un secteur en crise mais solidaire
Soutenir les pêcheurs, c’est soutenir par solidarité toute une filière, car de la bonne santé de son premier maillon dépend celle de tous les autres : criées et halles à marées, entreprises de mareyage, grossistes, rayons marée de la grande distribution et poissonniers artisans. Fragiliser la pêche, c’est donc fragiliser tout un secteur, qui emploie en France près de 70 000 personnes. Un secteur qui, depuis trois ans, essuie de violentes crises, sanitaire avec le Covid, politique avec le Brexit, économique avec l’explosion des prix de l’énergie - électricité et gazole en particulier - et une inflation galopante. A chaque fois, l’ensemble de la filière a fait preuve de solidarité et de résilience pour se relever. Mais les derniers coups portés, notamment par des décisions politiques et administratives, risquent cette fois de lui être fatals.
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